Évoquer, suggérer – une vision, une impression, en particulier dans la nature – convient à mon tempérament solitaire, secret... Je tente de traduire l'entraperçu, le "fragment d'exception" ressenti en de très rares instants. Mon travail d'écriture se rapproche alors de celui du peintre ou du sculpteur. Je cherche à sortir la langue de la gangue du "quotidien pratique" pour renouer avec ses sources vives, sa plasticité immédiate, à la modeler comme on taille le marbre ou pose des touches de couleurs sur une toile.
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la tête dans les vapeurs
des instants brefs s'allongent comme des ombres
sur le plancher qui fait tache
peut-être des restes d'incendie
parfois des méduses géantes et laiteuses
puis c'est la trouée bleue immense
à croire une broche à cabochon d'azur
elle barre l'horizon rien n'est attaché
apaisante comme une clairière
la vision se déracine
– frêles bouleaux passent –
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les mots et les tournures de phrases sont de plâtre
horriblement mal gâché friables à l'extrême
ces traînées tout autour
j'opacifie plus que je ne perce
le silence est-il d'or
le silence du regard
SUR UNE GOUTTE D'EAU
suspendue à une aiguille
cristallinité difficile à entendre
parcelle infime d'équilibre
une averse de septembre sur la forêt de mélèzes
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depuis toujours je collectionne des mots imaginés dans un cahier d'apparat
peur d'avoir été
j'ai besoin de l'oiseau du matin comme de la gorgée de café fort
peur d'avoir été
un morceau d'écorce de bouleau ou peut-être sa transparence argentée est emportée par le vent
Chantal Hartmann-Dacier
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